Le 24 juin, Zohran Mamdani, membre des Democratic Socialists of America (DSA), a remporté la primaire démocrate pour les élections municipales de New York. Il a battu Andrew Cuomo, l’ancien gouverneur de l’Etat de New-york, avec 43 % des voix contre 36 %. Agé de 33 ans et se revendiquant « socialiste », Mamdani est désormais favori pour devenir maire de la plus grande métropole des Etats-Unis, lors des élections de novembre.

« Victoire surprise »

La victoire de Mamdani lors de ces primaires n’est que la dernière manifestation de la profonde vague de radicalisation politique que connaissent les Etats-Unis. Alors que les Etats-Unis subissent toujours les conséquences de la crise économique de 2008, un nombre croissant d’américains rejettent les politiciens « traditionnels » du parti démocrate et du parti républicain, qui ont présidé à des années d’austérité et de misère, à des aventures militaires impérialistes sans fin, et à une succession de crimes racistes (entre autres choses).

Zohran Mamdani a fait de la lutte contre la vie chère le fer de lance de sa campagne. Il a notamment revendiqué le gel des loyers, la gratuité des bus et l’ouverture de services gratuits de garde d’enfants. Répondant à des préoccupations largement partagées, ces mots d’ordres lui ont permis de mobiliser une large base militante : 42 000 personnes ont participé à sa campagne. Un tel niveau de mobilisation autour d’un candidat socialiste aurait été impensable il y a encore 15 ans.

Son principal adversaire, Andrew Cuomo, était soutenu par tout l’establishment du parti démocrate (de Bill Clinton à Michael Bloomberg) et a reçu des millions de dollars de dons pour sa campagne. Cuomo semblait avoir plusieurs longueurs d’avance : en février il devançait Mamdani de 40 points dans les sondages, alors que ce dernier n’était alors qu’à 1 % des intentions de vote.

Mais les liens revendiqués de Cuomo avec des millionnaires et avec l'establishment démocrate se sont retournés contre lui : de nombreux travailleurs new-yorkais – en particulier les jeunes – ont saisi cette occasion d’exprimer leur colère contre le statu quo et ont voté pour Mamdani.

Collaboration de classe

En France, la victoire de Mamdani aux primaires a été saluée par de nombreux militants et dirigeants de gauche. Jean-Luc Mélenchon a par exemple tweeté : « Aux Etats-Unis aussi, le “sorpasso” (la gauche radicale dépasse le PS tradi) est commencé. ». Mamdani défend en effet un programme qui, s’il reste très modéré, est quand même bien plus à gauche que la ligne habituelle du Parti démocrate. Mais Mamdani le défend néanmoins dans le cadre de ce parti bourgeois, un des deux partis dirigeants de la classe capitaliste américaine.

Cette question est largement discutée dans le mouvement ouvrier et la gauche aux Etats-Unis depuis la campagne de Bernie Sanders en 2015 : faut-il soutenir des candidats se disant « socialistes » qui se présentent au sein du Parti démocrate ? En d’autres termes, la classe ouvrière peut-elle se servir d’un parti bourgeois pour servir ses intérêts ?

C’est ce que prétendent plusieurs dirigeants et organisations « socialistes » réformistes comme les DSA (auxquels appartient Mamdani), mais aussi Bernie Sanders ou Alexandria Ocasio-Cortez (AOC). En 2016 puis en 2020, Bernie Sanders a participé à la primaire démocrate pour les élections présidentielles, durant lesquelles il s’est heurté aux manœuvres de l’appareil du parti démocrate. Il s’est ensuite rallié à Hillary Clinton en 2016 puis à Joe Biden en 2020. En 2018, Alexandria Ocasio-Cortez s’est faite élire au congrès sous les couleurs du Parti démocrate.

Sanders comme AOC affirment qu’il s’agit d’utiliser le parti démocrate pour défendre leurs idées et de tirer le parti « vers la gauche ». En réalité, c’est l’inverse qui s’est produit : l’appareil du parti démocrate s’est prévalu du soutien de ces « socialistes » pour se présenter comme un « moindre mal » face à Trump – tout en continuant à attaquer les travailleurs. Loin de tirer le parti vers la gauche, c’est Sanders et AOC qui ont été tirés vers la droite, comme le montrent clairement les prises de positions d’Alexandria Ocasio-Cortez au Congrès : en 2021, elle s’est abstenu lors d’un vote sur l’aide militaire à Israël ; en 2022, elle a voté pour l’interdiction d’une grève des cheminots ; en 2025, elle a voté contre la suspension du financement américain du « Dôme de fer » israélien ; etc. Durant les élections présidentielles de 2024, Sanders et AOC ont soutenu aveuglement la candidature de Joe « Génocide » Biden, jusqu’à ce qu’il soit obligé de se retirer. Ils ont alors soutenu tout aussi aveuglement Kamala Harris.

En apportant leur soutien à Clinton puis Biden, AOC et Sanders ont en réalité permis à Trump de se présenter comme le seul candidat « anti-establishment » et de capter une partie de la colère des masses. Cela lui a permis d’être élu en 2016, puis réélu en 2024.

Indépendance de classe

En se présentant sous les couleurs du Parti démocrate, Zohran Mamdani entretient lui aussi l’illusion que ce parti bourgeois – le parti d’Hillary Clinton et de Joe Biden, le parti du soutien au génocide des Gazaouis et de la répression du mouvement Black Lives Matter en 2014 – pourrait être transformé pour servir les intérêts des travailleurs. En réalité, la « tactique » de Mamdani ne peut mener qu’au même résultat que celle d’AOC et de Sanders.

La bourgeoisie est d’ores-et-déjà en train de l’attaquer pour le contraindre à modérer son programme. Andrew Cuomo a annoncé qu’il se présenterait comme « indépendant » malgré sa défaite à la primaire. Il va bénéficier du soutien d’une bonne partie de la classe dirigeante, dont la presse colporte toutes sortes de calomnies contre Mamdani. Celui-ci est par exemple accusé d’être antisémite en raison de ses critiques (très modérées) de la politique d’Israël. Et cette pression ne fera que s’accentuer s’il est élu maire de New-York.

Dénué d’un programme révolutionnaire et privé d’un appareil militant organisé et coordonné – c’est-à-dire d’un parti – sur lequel il pourrait s’appuyer, Mamdani sera soumis à toutes sortes de pressions et de sabotage de la classe dirigeante, de la bureaucratie du parti démocrate et de l’appareil d’Etat. Pour ne pas rompre avec le Parti démocrate, il n’aura pas d’autre choix que de soumettre et de défendre lui aussi les intérêts de la bourgeoisie et de l’impérialisme américains. Au passage, il aura rejeté vers la droite ou l’abstention de très nombreux travailleurs qui ont de très bonnes raisons de détester les Démocrates.

Le problème fondamental auquel la classe ouvrière américaine est confrontée est précisément l’absence d’un parti politique indépendant capable de défendre ses intérêts. Avec ses 42 000 volontaires, la campagne de Mamdani aurait pu constituer le point de départ d’une campagne pour la fondation d’un tel parti.

La crise du capitalisme et l’expérience des présidences d’Obama, de Biden et de Trump ont nourri une profonde radicalisation politique, qui se tourne contre les millionnaires et leur système. Les réactions au meurtre du PDG Brian Thompson en décembre dernier, l’immense mobilisation des masses durant le mouvement Black Lives Matter en 2020, la vague de grève et de syndicalisation qu’a connu le pays ces dernières années ou, plus récemment, la résistance de dizaines de milliers de jeunes et de travailleurs aux rafles racistes organisées par la police de Trump. Tout cela est une démonstration évidente de l’immense potentiel révolutionnaire de la jeunesse et de la classe ouvrière américaine.

Mais ce potentiel doit s’organiser. Il doit défendre une stratégie d’indépendance de classe vis-à-vis des deux partis de la bourgeoisie américaine, et reposer sur les solides fondations théoriques du marxisme. C’est cette politique que défendent nos camarades des Communistes Révolutionnaires d’Amérique (RCA), la section américaine de l’Internationale Communiste Révolutionnaire !

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